- Rencontre
La dame aux jonquilles
Si vous passez à La Grande Vallée vous avez sûrement déjà croisé la dame aux jonquilles. Mais connaissez-vous son histoire ? Rencontre

Maria m’a donné rendez-vous, ce matin, dans le centre commercial de La Grande Vallée à Gonesse, où elle a prévu de vendre des jonquilles. Ce qui frappe quand j’arrive pour l’interviewer, c’est le nombre de personnes qui s’arrêtent rapidement devant son stand.
Car Maria, d’origine roumaine est connue ici.
En effet, cela fait 25 ans que Maria travaille sur Gonesse. Ceux qui s’arrêtent pour lui acheter des fleurs ne peuvent s’empêcher de lui faire un petit compliment “Maria, vous êtes toujours souriante”, “Maria, vous êtes courageuse”…
Quant à moi, j’ai rencontré Maria il y a 25 ans, l’hiver 85/86 où il faisait très froid. Je demande à Maria de me raconter les difficultés de ces premières années en France. Maria se rappelle “En 1986, il faisait très froid l’hiver, je n’avais pas le droit de travailler, nous vivions dans un squat, il y avait des rats. Un jour, je fus renversée par une voiture qui prit la fuite… Vous m’aviez emmenée aux urgences”. Frappée par la vétusté du squat, je lui avais fourni des couvertures.
Et Maria d’ajouter “J’allais à la piscine pour me laver une fois par semaine, j’arrivais à survivre en « traînant » dans les trains et dans le Centre commercial Leclerc. J’allais voir l’assistante sociale tous les 3 mois car je risquais d’être expulsée, n’ayant pas de papiers. Je m’en sortais avec des petits boulots (ménage, jardinage, courses) au « black ». J’ai même été escroquée par une association de Gonesse qui m’a dénoncée à la Police”.
Maria continue “En 1986, il fallait rester 5 ans sur le territoire pour avoir la carte de résident. J’ai fait beaucoup de démarches, et puis j’avais du mal à accepter la nourriture qu’on me donnait. Je ne voulais pas aller aux Restos du cœur, et je ne suis allée à la Croix-Rouge qu’une seule fois”.
Qu’est ce qui vous a aidé à ne pas sombrer ?
“je voulais absolument travailler, j’ai frappé à plusieurs portes. Puis, des gens de Gonesse m’ont fait connaître Médecins du Monde et Médecins Sans Frontières. Ils m’ont aidée et en retour j’ai pu servir de traductrice pour d’autres Roumains. Je voulais aussi aider car moi aussi j’avais été aidée”.
Après, en 2007, j’ai eu un travail fixe, déclaré, notamment du au fait que mon pays, la Roumanie, est rentré dans l’Union Européenne.
Si vous aviez un message pour les SDF, que diriez-vous ?
“De ne pas laisser tomber. Il faut se battre tous les jours. Si on ne frappe pas à la porte, elle ne s’ouvrira pas. Grâce à la volonté, et aux autres, on s’en sort, on reste digne. Aujourd’hui, je suis fière car je vis de mon travail”.
Voilà, MARIA, c’est une volonté de faire, de “fer”, un encouragement pour tous ces SDF anonymes qu’on peut croiser dans les rues…
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Irène Godard