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"My country is France" Khawush, 28 ans, migrant
Ils ont fui la guerre, certains il y a plus de 6 mois. Aujourd'hui en France, rencontre avec Khawush venu d'Afghanistan et arrivé depuis peu à Gonesse.

Kawush a 28 ans et il a fui l’Afghanistan il y a 6 mois. Aujourd’hui, on le croise, avec d’autres migrants, dans les rues de Gonesse.
Après avoir traversé de nombreux pays - le Pakistan, l’Iran, la Turquie, La Bulgarie, la Serbie, la Hongrie, l’Allemagne… - , il est arrivé à Paris, où il a connu les tentes installées à Jaurès, Stalingrad, La Chapelle pour être finalement transféré dans l’ancien hôpital de Gonesse.
Khawush a beaucoup marché, jusqu’à 28 jours en Iran, mais aussi en Bulgarie et en Turquie… Avant d’arriver en France, il a pris le train entre la Hongrie et l’Allemagne. Parfois, explique-t-il, il n’avait rien à manger. Les contrôles aux frontières étaient souvent lourds et tendus. Bien que se déplaçant le plus souvent en groupe, lui et ses compagnons de route se perdaient de vue, car ils n’avaient pas tous des téléphones. Ce périple, au final, lui aura coûté 8 000 dollars, somme en partie donnée par son père et complétée par ses économies.
En Afghanistan, le jeune homme était policier et gagnait de l’ordre de 300 dollars par mois. Il a dû quitter sa famille et son pays, raconte-t-il, à cause des talibans. Sa ville était devenue trop dangereuse, les libertés de travailler, de circuler, d’étudier, étantcontinuellement menacées sous la pression de ces talibans, qui gangrènent le pays depuis 30 ans. Kawush, précisément, est très en colère contre ces talibans : « des musulmans qui tuent d’autres musulmans, lâche-t-il, même des enfants, et on ne sait pas pourquoi ».
Aujourd’hui, le jeune afghan espère avoir le statut de demandeur d’asile. L’Office français d’Immigration et d’Intégration (OFII) a annoncé récemment aux migrants basés à Gonesse qu’ils allaient être transférés pour certains d’entre eux, à Toulouse ou à Nice. Khawush, lui, dispose, pour l’instant, d’un récépissé de 3 mois et attend un rendez-vous avec l’OFII. Il va tous les vendredi à Paris pour consulter soncourrier car il a une domiciliation postale à Paris.
En dépit de ses difficultés, Kawush est heureux d’être en France. Il a choisi la France, explique-t-il. Il rêve de reprendre les études, d’apprendre le français et de devenir journaliste. Car Kawush dit apprécier les Français qu’ils trouvent respectueux et gentils. Le mot respect revient d’ailleurs souvent dans sa bouche. Il considère que nos compatriotes aident beaucoup les migrants, en donnant des vêtements et de la nourriture. « My country is France » (« Mon pays, c’est la France »), résume-t-il avec un grand sourire.
Père de 2 enfants, Kawush ne peut téléphoner à sa famille que tous les 3 mois. Bien plus que les difficultés matérielles et les formalités administratives, c’est la solitude qui pèse sur Kawush. Mais à l’écouter, il fait preuve d’une telle dose d’optimisme et de combativité que son intégration à long terme ne laisse guère de place au doute. Pas de plainte dans son récit. Et beaucoup d’humilité.
Par Irène Godard
et Saliha Medarbi
L’Afghanistan en quelques lignes

Superficie : 652 000 km2 (soit légèrement plus que la France métropolitaine)
Population : environ 35 millions d’habitants
Capitale : Kaboul
Président : Asrad Ghani (qui a succédé à Hamid Karzai en 2014)
Langues officielles : dari et patcho
Espérance de vie : 48 ans
Religion : islam, 90 % de sunnites, minorité de sikhs et d’hindous
En 1979, les Russes envahissent le pays pour créer une république socialiste soviétique De là, va naître une résistance musulmane intégriste (parmi laquelle le Saoudien Oussama Ben Laden ) aidée par la CIA, l’Arabie Saoudite et le Pakistan.
Gorbatchev met fin à l’invasion russe en 1988. L’Armée Rouge est alors vaincue par le Djihad (les combattants afghans connaissaient très bien le terrain montagneux et furent aidés par les Américains). Cette guerre fera 1,5 millions de victimes.
Les moudjahidines (avec l’Alliance du Nord) prennent le pouvoir et le fameux commandant Massoud (« le lion du Pandjir) est nommé Ministre de la Défense. Le Pakistan et les Etats Unis aident ces moudjahidines. A partir de 1989, des guerres de clan fratricides éclatent. Les talibans arrivent en 1994. (talibans signifie « étudiants en théologie »). Ces talibans vont essayer de rétablir la paix en instaurant une dictature fondamentaliste avec le Mollah Omar, « Commandeur des Croyants ». Oussama Ben Laden rentre du Soudan vers l’Afghanistan et déclare le Djihad aux Américains. Les talibans prennent Kaboul en 1996 et tuent le président en fonction Mohammad Nadjibullah.
Une résistance s’organise contre ces talibans dans le nord-est du pays avec le mouvement Alliance du Nord, et avec notamment le commandant Massoud ) (qui fera la tournée des capitales européennes en Avril 2001 sans être écouté). Mais, le 9 septembre 2001 (2 jours avant l’attentat de Manhattan et du Pentagone), Massoud est assassiné par 2 faux journalistes arabes.
Les Etats-Unis cessent alors leur aide après ces attentats. Ainsi se met en place un régime fondamentaliste, fondé sur la charia. Les talibans vont interdire la musique, la télévision, les divertissements. Les filles ne sont plus autorisées à aller à l’école et les femmes ont obligation de porter la burka, les hommes la barbe. La consommation d’alcool peut être punie de mort. De même, la danse, la drogue, les divertissements sont interdits. Reste que le trafic d’opium est florissant (90 % de l’opium mondial est produit dans ce pays). Flagellation, amputation (en cas de vol), lapidation, exécution publique seront les sanctions appliquées.
En 2002, après les attentats contre le World Trade Center, les talibans (et Ben Laden) deviennent la cible des Etats-Unis. Hamid Karzaï est alors élu chef du gouvernement en octobre 2004 et va tenter de rétablir l’ordre avec l’aide des Etats-Unis. Les talibans tentent de détruire son gouvernement en commettant des attentats. Il sera réélu en 2009.
Avec l’OTAN, les forces internationales, essaient, elles, de combattre la guérilla menée par les talibans qui pratiquent les attentats suicides. La mort de Ben Laden en 2011 ne change pas vraiment la donne. Civils et forces de la coalition sont visés. L’accord de paix conclu entre les talibans et Washington définit les modalités de la présence américaine après le retrait des autres forces étrangères, mais est mis à mal avec l’assassinat du président Burhanuddin Rabbani (qui avait fondé un parti d’inspiration islamiste et de résistance contre les Soviétiques). En 2014, c’est Ahsraf Ghani qui est élu. I.G.