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  • Découverte

Passionnée de francophonie…


Quitter sa « chère Banlieue Nord » et s’installer à 800 kilomètres a permis à Agnès Desfosses de réfléchir à son action d’artiste et d’ancienne habitante engagée. Ce qui a été au centre de sa vie, elle l’a retrouvé ailleurs avec la même acuité. Comme au Festival des Cinémas de l’Afrique en Pays d’Apt où s’expriment de nombreux cinéastes francophones méconnus ou inconnus. D’où sa réflexion et son témoignage, plus large, sur les cultures francophones, qu’elle nous livre ici.

274 millions de personnes s’expriment en français à travers le monde dont plus de la moitié en Afriques. (source 2014 - Libération)

Comment ai-je fait connaissance avec les créations « d’artistes de la Francophonie » ? Difficilement et soudainement… Ce ne fut pas dans mes dialogues avec d’autres habitants de ma commune de la banlieue Nord de Paris à Villiers le Bel : ce sujet a été trop longtemps absent de nos conversations… Ce ne fut pas en fréquentant les Médiathèques de la Communauté de Communes de Roissy-en-France ni la Fnac au Forum des Halles, à Paris: le rayon découverte Caraïbe et Afrique est incomplet et ridiculement petit.

Pour aller vers leurs œuvres, ne faut-il pas déjà connaître le nom des auteurs ou le nom de leurs livres ou de leurs films ? Or tout est rangé par ordre alphabétique…

Non ! C’est le hasard qui m’a mis en présence en Novembre 2015 de Sidiki Bakaba, qui représente près de 50 ans de mise en scène de théâtre, de jeu d’acteur, de réalisations de films de fictions et de documentaires : A ce moment-là je ne savais rien de lui et quasiment rien de la francophonie...

Il sort de la salle de projection « Collection et Archives » Vidéothèque de la ville de Paris pendant que je m’apprête à y rentrer. J’attends au guichet pour dire quel film je voulais voir.

Je fais la queue derrière lui et saisis des bribes de conversation avec la femme du guichet. Il cherche où est la mémoire de la culture cinématographique africaine, mais aussi des films qu’il a tourné soit comme acteur soit comme réalisateur ou co-réalisateur…

Où ? « Il y eut la guerre en Côte d’ivoire, Madame. » Au guichet, cette femme, très à l’écoute et très compétente, lui donne les informations qui vont lui permettre de démarrer une recherche, le nom des personnes clé auxquelles il va falloir s’adresser.

Elle le prévient : « -Vous n’êtes qu’au début d’une épopée ! » Elle ajoute avec un étrange sourire : « J’espère pour vous que cette épopée ne sera pas aussi longue ni aussi périlleuse que celle de Boubacar, le personnage que vous avez interprété si magnifiquement dans Bako, l’autre rive! Intriguée…". Je ne veux plus voir le film pour lequel je me déplaçais et je demande à voir "Bako l’autre rive" de Jacques Champreux .

Un socle culturel commun

Pas seulement émue par ce film mais très perturbée dans mon RER D de retour pour la banlieue Nord, je retiens des larmes de dépit au milieu de ceux qui taisent leur exil. Comment et pourquoi suis-je dans l’ignorance de tout un pan de cette culture de langue française dont je commence seulement à entrevoir la richesse ? Est-ce à dire que les artistes de la francophonie africaine ne peuvent concerner que les ressortissants des pays francophones africains? C’est absurde ! L’art franchit les frontières, a la capacité de s’adresser à tous et d’ouvrir de façon sensible l’esprit de chacun !

Je passe des heures sur internet pour connaître le CV de Sidiki Bakaba - Prix d'interprétation pour le film "Bako, l'autre rive", festival de la Francophonie, Nice 1979). Je regarde aussi ceux d’autres cinéastes qui lui sont contemporains. Pour nombre d’entre eux, il a joué en tant qu’acteur. De liens en liens, je découvre l’existence et les œuvres de cinéastes de langue française comme Henri Duparc, Désiré Écaré, Issa Coello, Sembene Ousmane , Moustafa Diop.

Je lis Bernard Dadié, Ahmadou Kourouma, Hampate Bâ…Pourquoi profitons-nous si peu de leurs œuvres ? Pourquoi ne sont-elles pas ouvertes à un large public ? Elles pourraient nous éclairer, nous inspirer, traverser les générations et enraciner la jeunesse dans un socle culturel commun… Que l’on soit francophone ou franco-français, nous pourrions tous en être fiers!

Aujourd’hui, je dévore les œuvres de la nouvelle génération, celles de jeunes auteurs tels qu’Alain Mabanckou, Fatou Diome, Léonora Miano et de cinéastes comme Mahamat-Saleh-Haroun ou Aïcha Boro. Un peu plus facile d’accès : Ils sont publiés dans les grands quotidiens français, sont interviewés et écrivent des livres en langue française ou présentent des films dans des festivals.

Nous avons besoin des artistes de toutes les francophonies qui ont une autre vision et un regard critique sur leur propre pays, la colonisation, les limites de la décolonisation, le monde, l’Europe et la France pour comprendre ce qui se noue culturellement aujourd’hui et à l’avenir.

Pour cela il faudrait que cette culture francophone avec la richesse de sa spécificité, cesse d’être un monde à part et intègre largement la culture française par la grande porte… de l’éducation nationale par exemple !

Par Agnès Desfosses

A NE PAS MANQUER

Bientôt la 22ème édition du festival «Regards sur le Cinéma du Monde», dont l’épicentre est Rouen, s’ouvre au Grand Paris : en Île de France-Seine-Normandie. Il aura lieu du 27 janvier au 5 février 2017.

Les films (fictions et documentaires) de ce festival seront présentés à Paris.

Toutes les séances seront programmées au cinéma Le Desperado, 23 rue des Ecoles, 75005 Paris. Beaucoup sont de langue française dont un des films de Sidiki BAKABA, "Roues libres"diffusé le 4 février à 18h . Tout le programme ici

ET POUR PROLONGER LA DECOUVERTE

- Festival des cinémas d’Afrique en Pays d’Apt (FCAPA)

« Marianne et le garçon noir » de Léonora MIANO. (Libération)

- Le camp de Thiaroye (1988) , film d'Ousmane Sembene avec Sidiki Bakaba. (ci-dessous)

Bal poussière film d'Henri Duparc avec Akissi Delta (ci-dessous)

#Cinéma #francophonie

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